La licence logicielle est un contrat régissant le droit d'usage du logiciel. La variété des types de licence, et surtout la nécessité légale d'obtenir le consentement du client pour tout contrat, expliquent qu'au premier démarrage de chaque logiciel, son approbation soit sollicitée. En vous vendant un ordinateur, le constructeur se soumet à cette condition qui inclut donc l'hypothèse d'un refus de votre part quant à ce contrat accompagnant le logiciel.
Comme le mentionne le Contrat de Licence Utilisateur Final (CLUF), à ce refus est attaché un remboursement à solliciter auprès du constructeur. C'est le fondement simple et premier sur lequel il faut motiver toute demande devant un tribunal : « l'obligation contractuelle » qui naît pour le constructeur de votre refus du CLUF. La DGCCRF ne dit pas autre chose dans sa Réponse d'intérêt général 2005-03.
Cette obligation contractuelle, les constructeurs s'efforcent de l'éluder, soit en la niant par le biais de mentions écrites dans leurs conditions générales de ventes (Dell) ou dans les documents d'accompagnement du matériel, soit en soumettant le remboursement à des conditions absurdes.
Le flou des termes du CLUF n'autorise en rien les constructeurs à fixer à leur gré les règles du remboursement, a fortiori à revenir sur son principe. Des mentions en ce sens sont privées de valeur, soit parce que portées à la connaissance du client postérieurement à la vente, soit comme clauses abusives.
En effet, est qualifiée d'abusive et dès lors réputée non-écrite (même si vous avez signé en connaissance de cause), toute clause ayant « pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » (art L132-1 du code de la consommation). Ainsi en a-t-il été jugé d'une procédure de remboursement particulièrement lourde et au final coûteuse pour le client (jugement Gutzwiller c. Acer).
En plus de sa dimension contractuelle, le remboursement trouve aussi un fondement dans la réglementation sur la vente liée. Le jugement Gutzwiller c. Acer est venu rappeler que la tolérance dont bénéficiait la vente liée au prétexte de son intérêt pour le client novice ne saurait rendre inopérante la réglementation. Celle-ci doit être respectée et appliquée quand un acheteur plus avisé le sollicite.
Il est intéressant de noter qu'à l'occasion des divers procès, les constructeurs eux mêmes ont mis en avant le remboursement comme l'élément faisant échapper la vente liée à la prohibition de l'art L 211-1. Si cette pratique commerciale a jamais pu acquérir par l'usage une quelconque force juridique (cf. interprétation du jugement de la Cour de Cassation), la possibilité du refus du CLUF, présente dès l'origine, participe donc pleinement de l'équilibre entre les acteurs de la vente ; dès lors, les constructeurs ne sauraient s'abstraire de ses conséquences. Les jugements qui reprennent l'argumentation des constructeurs ne concluent pas autrement.
En l'absence d'information sur le prix des logiciels pré-installés, ceux des constructeurs qui accordent un remboursement proposent des montants entre 25 et 40 euros, correspondant selon eux à leur coût de revient. Ces montants ont été jugés « dérisoires », voire comme participant du caractère abusif de la procédure de remboursement.
Une évaluation à partir du prix de revient n'a aucun sens : le prix de revient correspond à un moment du processus économique, le prix final acquitté par le consommateur inclue la rémunération de tous les intermédiaires, dont celle du constructeur qui doit notamment couvrir le coût de l'assistance sur le logiciel (non assurée par Microsoft sur les licences OEM). C'est donc assez judicieusement que la jurisprudence se fonde sur la valeur de remplacement, c'est-à-dire sur le prix que devrait acquitter le client s'il voulait acquérir des logiciels équivalents.
De nombreuses informations concordent en fait pour évaluer le prix des licences des logiciels pré-installés entre 10 et 30% du prix total de l'ordinateur. Reconnaître les sommes proposées par les constructeurs reviendrait à leur accorder le bénéfice de l'opacité dont ils sont à l'origine en violation de l'obligation d'information sur les prix comme de la prohibition de vente subordonnée.
Dans l'hypothèse où ils se décideraient à faire afficher une valeur pour les licences des logiciels pré-installés, le consommateur n'aurait pas davantage d'éléments pour apprécier la « justesse » du montant proposé. Les difficultés que mettent les constructeurs au remboursement comme la variété des procédures n'augurent rien de bon. Finalement, la seule possibilité d'apprécier la valeur des licences logicielles est de rendre optionnelle leur acquisition tout en permettant leur achat, indépendament, au même montant. Autrement dit : sortir de la vente liée et faire disparaître la pratique du remboursement, son corrolaire.