Foire Aux Questions

Quand vous, consommateur, achetez un ordinateur, un système d'exploitation est déjà pré-installé, et sa licence d'utilisation vous est vendue conjointement avec l'ordinateur. Or, vous qui voudriez souvent avoir le choix, quel est votre intérêt ? Cette vente conjointe (appelée vente subordonnée) a-t-elle un impact sur la concurrence entre les systèmes d'exploitation et donc sur leur prix et leur qualité ? Quels sont les enjeux de la fin de la vente subordonnée, pour vous et pour notre pays ? Savez-vous si des décisions de justice ont fait avancer les choses pour les consommateurs ?

Si certaines de ces questions vous intriguent, cette FAQ est faite pour vous : bonne lecture !

L'intérêt du consommateur : pré-installation ou vente subordonnée ?

Qu'est-ce que la vente subordonnée ?

Les jugements passés : quel enseignement ?

La concurrence sur les systèmes d'exploitation

Quel choix ont les consommateurs en pratique ?

Les professionnels peuvent-ils proposer l'optionnalité ?


L'intérêt du consommateur : pré-installation ou vente subordonnée ?

Quel est l'intérêt du consommateur ?

Pour apprécier l'intérêt du consommateur, il est utile d'avoir à l'esprit plusieurs points.

  1. De nombreux acquéreurs potentiels d'un ordinateur (deux tiers selon une étude du CREDOC), souhaiteraient avoir le choix du système d'exploitation.
  2. La concurrence réelle entre les systèmes d'exploitation fait baisser les prix, comme le montre le marché des netbooks qui a émergé en 2008. Elle doit s'accompagner d'une obligation de publication des spécifications techniques de chaque élément matériel.
  3. La pré-installation de plusieurs systèmes d'exploitation sur le disque dur et le choix de certains d'entre eux après achat est possible.
  4. L'utilisateur peu expérimenté préfère avoir son système d'exploitation pré-installé.
  5. La pré-installation d'un système d'exploitation sur le disque dur n'implique pas qu'il doive être obligatoirement vendu conjointement avec l'ordinateur.

Pré-installation ou vente subordonnée, est-ce la même chose ?

Dans la position officielle de 2005 de la DGCCRF, dans des réponses ministérielles  aux députés et dans quelques jugements, la vente liée était excusée sous prétexte de l'utilité de la préinstallation pour un consommateur  moyen. Or, l'une est parfaitement possible sans l'autre.

Voici un exemple qui le démontre. Un système d'exploitation est pré-installé sur le disque dur, mais il est possible, si on le souhaite, de ne pas payer la licence : il suffit de laisser dans les mains du vendeur le code d'activation qui permet le premier démarrage du système pré-installé.

D'autres méthodes peuvent également être utilisées pour donner une possibilité à un consommateur de ne pas acheter un logiciel pré-installé. Ainsi, et c'est ce que nous souhaitons, un utilisateur peut très bien bénéficier d'une pré-installation sans qu'un autre soit obligé de payer une licence, associée au même logiciel pré-installé, qui lui est inutile.

En pratique, comment dissocier pré-installation et vente subordonnée ?

À titre d'exemple, voici quelques méthodes envisageables.

  1. Le système d'exploitation (ou le logiciel) pré-installé est en version d'essai : au bout de, par exemple, 60 jours, il requiert de la part de l'utilisateur un acte d'achat séparé pour être définitivement utilisable à son plein potentiel.
  2. Le système d'exploitation (ou le logiciel) pré-installé, lors son premier démarrage, requiert un numéro d'activation. Ce numéro d'activation est vendu de manière optionnelle, tout comme, par exemple, une extension de garantie.
  3. Plusieurs systèmes d'exploitation sont pré-installés. Au premier démarrage, un logiciel de chargement amélioré permet à l'utilisateur d'activer un ou plusieurs systèmes d'exploitation (certains nécessitant un code d'activation acquis séparément). Le logiciel de chargement efface alors définitivement les systèmes non activés et termine l'installation des systèmes choisis. Une telle solution est proposée par la société Nexedi, entreprise membre de l'AFUL.
  4. Le système d'exploitation (ou le logiciel) pré-installé dans un média amovible (CD/DVDROM, clé USB, carte mémoire, etc.) plutôt que dans le disque dur. Ce média amovible pourrait être simplement retiré du « carton » lors de la vente si le client le souhaite. Une telle solution permettrait à d'autres éditeurs, n'ayant pas même contracté avec le constructeur, de proposer, sur le même lieu de vente, leur propre média amovible contenant leur système d'exploitation pré-installé.

Qu'est-ce que la vente subordonnée ?

Matériel et système d'exploitation : un produit unique ou deux produits distincts ?

Les associations disent qu'il s'agit de deux produits distincts. Les constructeurs et les distributeurs disent que le matériel et le système pré-installé constituent un produit unique. Qui croire ?

Sur le fond, le consommateur averti sait qu'il est possible d'acquérir un système d'exploitation séparément en magasin, puis de l'installer sur l'ordinateur qu'il aurait lui-même assemblé par exemple. Plus largement, l'installation d'un nouveau logiciel est une pratique courante pour de nombreux utilisateurs. Ainsi, sur le fond, matériel et système d'exploitation sont bien deux produits distincts.

D'un point de vue officiel, la DGCCRF a affirmé dès 2005 qu'il s'agissait de deux produits distincts, ayant de surcroît un régime juridique différent. Ce point a été réaffirmé au TGI de Montpellier (Dell, 17 juin 2008, page 11) et au TGI de Paris (UFC / Darty, 24 juin 2008, page 7).

Quels sont les enjeux de la fin de la vente subordonnée ?

La fin de la vente subordonnée est importante à plus d'un titre.


Les jugements passés : quel enseignement ?

La vente subordonnée d'un système d'exploitation avec un ordinateur, contestée par un nombre croissant de consommateurs (pétition racketiciel, enquête du CREDOC), a fait l'objet de procédures judiciaires de la part de nombreux particuliers et de la part de l'association de consommateurs UFC-Que-choisir.

Quels jugements ont fait avancer l'intérêt du consommateur ?

  • L'affichage détaillé des prix, exigé par l'article L.122-1 du Code de la Consommation en cas de vente subordonnée, a été réaffirmé au TGI de Montpellier (Dell, 17 juin 2008), au TGI de Paris (UFC / Darty, 24 juin 2008). À notre connaissance, ces jugements tardent à être appliqués (Dell, Darty).
  • La nouvelle rédaction (mars 2009) de l'article R.132-1 du Code de la Consommation dispose que doivent être considérées abusives de manière irréfragable, entre autres, les clauses qui n'ont pas été portées à la connaissance du consommateur avant son achat. Le Tribunal de Proximité de Bourges s'est appuyé sur cet article pour sanctionner le constructeur qui n'avait pas informé le consommateur quant au montant du remboursement et quant à la procédure proposés pour les licences logicielles non désirées (affaire Sierra/Acer, 4 mai 2009).

Sur quels points les juges se sont-ils peut-être mépris ?

  • La vente subordonnée a été jugée comme acceptable en vertu du motif légitime que constituerait l'intérêt du consommateur. Or, dans l'article L.122-1 du Code de la Consommation, le motif légitime s'applique au refus de vente et non pas à la vente subordonnée. Jugements concernés : TGI de Paris, UFC / Darty, 24 juin 2008.
  • Plusieurs jugements ont excusé la vente subordonnée au prétexte qu'elle serait dans l'intérêt du consommateur. Or, les arguments avancés dans ces jugements justifient en réalité que le consommateur a un intérêt pour la pré-installation. Pré-installation et vente subordonnée sont en réalité deux choses distinctes et dissociables, et seule la pré-installation est souvent considérée comme étant dans l'intérêt du consommateur. Jugements concernés : Dell, 17 juin 2008, TGI de Montepellier, page 10 ; UFC / Darty, 24 juin 2008, TGI de Paris, page 8.
  • Plusieurs juges ont estimé que l'existence d'une procédure de remboursement faisait cesser l'infraction pour vente subordonnée. En réalité, le remboursement a posteriori est bien moins intéressant que l'optionnalité dès l'achat : le remboursement a posteriori établit un déséquilibre entre le consommateur et le professionnel, déséquilibre susceptible d'altérer le comportement économique du consommateur. Jugements concernés : Cresp/Asus, page 9 ; Goujon/Asus, page 3 ; Hordoir/Asus, page 4.

Quels autres points les jugements pourraient-ils préciser ?


La concurrence sur les systèmes d'exploitation

Le marché des netbooks et les bénéfices de la concurrence

Les netbooks ont été commercialisés en France au début de l'année 2008. Ces ordinateurs répondent idéalement à une utilisation nomade (connexion, navigation, courrier etc). Cette spécificité d'un matériel assez léger a écarté Windows Vista, trop gourmand, et a mis en concurrence frontale Linux et Windows XP : les premiers modèles étant sortis sous Linux, le système Windows XP a vu son prix réduit des deux tiers et a alors pu reconquérir à peine plus de la moitié de ce marché.

Le tatouage distord-il la concurrence ?

Le tatouage est un système de blocage empêchant le démarrage de l'ordinateur si les composants matériels ou logiciels ne sont pas ceux attendus. Concrètement, ce verrouillage est réalisé au niveau du BIOS en vérifiant les numéros d'identification de la version du système d'exploitation et du disque dur installés.

Le tatouage peut avoir plusieurs conséquences : impossibilité de changer son disque dur pour en augmenter la capacité ; impossibilité d'utiliser un autre système d'exploitation comme Linux, ou même une autre version de Windows acquise en magasin ; captivité du client qui doit passer par un professionnel pour toute opération de mise à jour conséquente de la machine ; difficulté à la revente auprès de personnes souhaitant installer d'autres logiciels.

En empêchant la plupart des utilisateurs d'installer sur le disque dur un autre système d'exploitation que celui choisi initialement par le constructeur, la pratique du tatouage réduit la découverte ou l'utilisation d'autres systèmes d'exploitation, et distord ainsi la concurrence.

Le matériel aux interfaces mal spécifiées distord-il la concurrence ?

De nombreux composants matériels ont des caractéristiques techniques (interfaçage avec le système d'exploitation) qui ne sont pas rendues publiques. Cette non-divulgation des caractéristiques d'interopérabilité induit de facto une distorsion de concurrence, puisqu'il est assez fréquent qu'un ou deux composants soient mal reconnus par les autres systèmes d'exploitation que celui qui a été configuré avec ce matériel.

La vente subordonnée, très répandue depuis plusieurs années au profit d'un seul système d'exploitation, a favorisé l'apparition et la poursuite assez fréquente de cette pratique de non divulgation des caractéristiques d'interopérabilité des matériels.

Que faut-il imposer pour rétablir la concurrence ?

Pour rétablir la concurrence entre les systèmes d'exploitation, il faudra donc imposer aux constructeurs de composants matériels la publication des spécifications nécessaires à leur interopérabilité avec tout système d'exploitation.


Quel choix ont les consommateurs en pratique ?

Le remboursement a posteriori fait-il cesser la vente subordonnée ?

Techniquement, une possibilité de remboursement a posteriori ne change en rien la nature de la vente. De plus, dans les faits, une telle possibilité n'est pas équivalente à un choix offert dès l'achat.

  • Possibilité de remboursement : même contre une promesse de remboursement sur demande, le vendeur qui a déjà obtenu le consentement du consommateur pour le paiement du système d'exploitation pratique en quelque sorte la technique du pied dans la porte. Or, cette technique est connue pour altérer la décision. En outre, l'information préalable est en pratique insuffisante, notamment sur le prix et la procédure de remboursement.
  • Système d'exploitation optionnel : dans ce cas, le choix étant offert dès l'achat, le prix est forcément connu dès avant l'achat, et la procédure est immédiate. Le consommateur est alors à égalité avec le vendeur.

Dans le cas d'une simple possibilité de remboursement, le manque potentiel d'information et, plus encore, le fait qu'une nouvelle démarche soit nécessaire après l'achat pour initier le remboursement, sont de nature à altérer le comportement économique du consommateur. Ainsi, dans le cas d'une possibilité de remboursement après l'achat, non seulement la vente subordonnée demeure, mais le fondement de son interdiction demeure.

L'information préalable à la vente est-elle suffisante ?

Le remboursement a posteriori est de nature à altérer le comportement économique du consommateur, principalement en raison du défaut d'information préalable dont il s'accompagne souvent en pratique.

  • Il est rare que le contrat de licence (CLUF, ou EULA en anglais) du système d'exploitation soit consultable avant l'achat.
  • Jusqu'assez récemment, la procédure de remboursement n'était pas disponible avant achat. Elle est actuellement disponible, pour certains constructeurs, auprès de quelques distributeurs.
  • Naguère encore, le montant remboursé était transmis au consommateur avec la procédure de remboursement. Depuis peu, cette information de chaque constructeur est disponible auprès de quelques distributeurs.
  • Il est souvent très difficile, pour le consommateur, d'obtenir du vendeur une attestation écrite que l'ordinateur n'est pas tatoué.

L'AFUL a rassemblé les informations publiées par les principaux constructeurs ou par leurs revendeurs afin de fournir aux consommateurs un élément d'appréciation sur le degré de difficulté à obtenir le remboursement du système d'exploitation, et sur le montant proposé.

Pour le consommateur, est-il suffisant de disposer d'une solution ailleurs sur le marché ?

L'article L.122-1 du code de la consommation précise qu'en cas de vente conjointe, chaque élément du lot doit également être disponible séparément sur le même lieu de vente. Cette disposition est-elle utile pour un ordinateur et un système d'exploitation ?

  • Une fois que le consommateur a identifié une configuration correspondant à ses besoins, chercher ailleurs une configuration similaire prend du temps.
  • Étant donné le nombre de modèles différents dans chaque enseigne, la comparaison des offres est presque impossible.
  • En pratique, la seule façon d'acheter un ordinateur portable sans système d'exploitation (ou avec un système gratuit) est en général de le faire construire sur mesure. Il est alors beaucoup plus onéreux.

Ainsi, en étant contraint de chercher une éventuelle offre similaire sans système d'exploitation sur le marché, le consommateur subit un préjudice certain : non seulement il dépense un temps important, mais le résultat de ses recherches est aléatoire. C'est pourquoi certains consommateurs vont en justice pour obtenir du constructeur, s'il le refuse à l'amiable, un remboursement équitable du système d'exploitation.


Les professionnels peuvent-ils proposer l'optionnalité ?

Des ordinateurs nus requièrent-ils une réorganisation de la production ?

Chaque variante d'un produit nécessite la mise au point d'un process de fabrication spécifique. Ainsi, la coexistence d'ordinateurs pré-installés (pour la majorité des consommateurs) et d'ordinateurs dits nus, c'est-à-dire ayant un disque dur vierge (ou comportant un système rudimentaire pour effectuer les tests matériels) sur une même chaîne de fabrication amènerait à modifier la méthode de fabrication actuel afin de l'adapter à cette nouvelle configuration.

Ces modifications, le doublement de modèles à produire et à gérer, le surcout ainsi engendré servent souvent d'excuse pour maintenir en place la vente liée. Mais en réalité, l'argument est hors de propos puisque ce n'est pas ce que nous demandons.

Actuellement, chaque disque dur contient-il initialement quelque chose de différent ?

Afin d'optimiser le processus de fabrication, le paramétrage du disque dur se fait par le procédé d'image disque qui permet une copie à l'identique. Cela peut se décliner de deux manières différentes :

  1. Le système d'exploitation est pré-activé et fonctionne directement.
  2. Le système d'exploitation doit être activé au premier démarrage : un grand nombre d'utilisateurs, chacun avec son propre numéro d'activation, peut activer la même image disque du système d'exploitation.

L'optionnalité requiert-elle une réorganisation de la production ?

D'un point de vue technique, la mise en place de l'optionnalité du système d'exploitation consisterait au remplacement d'une image disque pré-activée par une image disque à activer au premier démarrage.

La pré-installation sur chaque ordinateur (du même modèle) demeurerait alors rigoureusement identique sans aucune incidence sur l'organisation de la production

Il n'y a donc, pour les constructeurs, aucun obstacle technique ou logistique à proposer l'optionnalité.

Et avec ça : prendrez-vous un système d'exploitation ? une extension de garantie ?

D'un point de vue commercial, une extension de la garantie attachée à un ordinateur est classiquement proposée par le vendeur une fois le produit choisi. En magasin, il propose ce service en surplus au moment de la finalisation de la commande. Sur le site internet des distributeurs, cette option est proposée sous la forme d'une simple case à cocher, qui incrémente le prix à payer d'un montant spécifié.

Il n'y a donc, pour les vendeurs ou les distributeurs, aucun obstacle commercial à proposer l'optionnalité.