Vente liée PC/OS : ACER est-il incurable ?

C'est avec une impression de déjà-vu que nous apprenons que le constructeur informatique ACER a été condamné en justice dans le contexte de la vente liée PC/OS. Malgré les quelques progrès accomplis ces dernières années, il semble que le constructeur ait renoué avec ses travers d'antan…
autruche ACER

ACER est le constructeur informatique qui a été sans doute le plus condamné par la justice (sept fois jusqu'à ce jour) pour le caractère abusif de sa procédure concernant les licences logicielles vendues de force avec tout nouvel ordinateur de sa marque. Condamnation après condamnation, la procédure ACER avait légèrement évolué. Le groupe Racketiciel de l'AFUL espérait bien que, sur cette lancée, cette procédure pût changer encore considérablement et devenir un jour acceptable. Las, le jugement rendu il y a quelques jours par la juridiction de proximité de Brest révèle le vrai visage d'ACER.

Les illusions perdues…

ACER avait conservé l'obligation d'aller-retour de l'ordinateur, en réalité sans fondement. Toutefois, dans une tentative pour éviter des condamnations répétées, le constructeur avait fini par prendre à sa charge les frais de transport. Ainsi, aujourd'hui, le consommateur expédie son ordinateur chez ACER. Après une semaine maximum, ACER réexpédie la machine au dit consommateur, lequel obtient alors en principe un (maigre) dédommagement pour les logiciels (40 € pour Windows 7 Home et les autres logiciels pré-installés). Les frais de transport étant désormais à la charge du constructeur, il pourrait paraître relativement tentant de faire confiance à ACER et de se conformer à la lettre à cette procédure contraignante pour obtenir ce dédommagement.

Pourtant, à leur grande surprise, certains consommateurs n'ont jamais reçu leur chèque malgré des relances. Ils n'ont donc eu comme seules options que de renoncer à tout dédommagement ou bien de porter l'affaire en justice. Au moins deux (à notre connaissance) irréductibles qui avaient choisi la seconde solution ont bizarrement été immédiatement contactés par ACER, sitôt la déclaration au greffe effectuée. Le constructeur leur a proposé un « arrangement amiable » couvert par une clause de confidentialité. Ainsi, au moins dans certains cas et après lui avoir fait croire à la possibilité d'un dédommagement, le constructeur donnait finalement satisfaction au consommateur… mais uniquement s'il avait le courage de porter l'affaire en justice ! Méthode géniale pour limiter le nombre de dédommagements effectifs ! On comprend dès lors pourquoi le constructeur voulait interdire au consommateur finalement dédommagé de divulguer la chose : il eût été du plus mauvais effet que le commun des mortels prît connaissance de sa mauvaise volonté déclinée avec un si savant cynisme !

Mais c'était compter sans l'obstination d'un Breton qui ne s'est pas laissé effrayer par les méthodes d'ACER. Il a porté l'affaire en justice mais n'a pas retiré sa demande auprès du tribunal de proximité de Brest lorsque ACER lui a fait des propositions assorties d'une clause de confidentialité. La justice lui a donné gain de cause.

Le vrai visage d'ACER, au grand jour

Le jugement rendu le 24 février 2011 par la juridiction de proximité de Brest rapporte les termes de la clause de confidentialité :

les parties conviennent que le présent protocole restera confidentiel, en conséquence, les parties s'engagent à ne pas en révéler l'existence et le contenu (...) cette confidentialité est une condition déterminante du contrat.

Le juge souligne qu'il s'agit d'une clause non prévue au contrat. Or, par nature, souligne le jugement, « un protocole transactionnel [est] un acte qui exige l'accord des parties qui s'y engagent. C'est à bon droit que M.B. refuse cet engagement ».

Le juge condamne donc ACER à payer effectivement la somme de 40 € promise à M.B. qui s'était conformé à la lettre à la procédure du constructeur. La société ACER est également condamnée à verser 200 € à M.B. en raison du préjudice subi par les frais exposés, au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Et, bien entendu, ces sommes devront être payées par ACER sans aucune condition : il n'est cette fois plus question de la moindre clause de confidentialité, le jugement ayant été prononcé publiquement.

Pour le groupe de travail Racketiciel de l'AFUL, cette condamnation est très utile. Elle permet de faire connaître au public les pratiques réelles du constructeur ACER (dont nous avions connaissance mais que nous ne pouvions dévoiler tant que cela n'avait pas été jugé publiquement). En outre, et surtout, cette décision encourage les consommateurs à ne plus se laisser abuser par de telles méthodes qui confinent à l'intimidation.

L'équipe Racketiciel se tient à la disposition des consommateurs engagés dans ce type de procédures (contact).

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