Evolution arguments juridiques

Depuis 2006, les arguments juridiques ont évolué.

Principaux arguments juridiques actuels concernant les racketiciels

Pratiques commerciales déloyalesTextes directive 2005/29/CE, Art L132-1 du Code de la consommation et annexe, Art R132-1, article L. 122-3 du Code de la Consommation.  
AffaireRemarqueAnalyse
Marty c. Samsung (Saint Denis, 10 janvier 2012) Ce jugement, pour la première fois, déclare explicitement que la revente du système d'exploitation par le constructeur sans que le client l'ait demandé constitue une pratique « déloyale en toute circonstance à raison de son caractère agressif » (L. 122-3) et est, à ce titre, interdite.

commentaire de Me Cuif

Vermel c. Dell (Toulouse, 20 mai 2011) Les conditions générales de vente et les pratiques commerciales de Dell sont jugées déloyales. Le juge rappelle que le matériel et les logiciels sont deux éléments distincts. Les pratiques commerciales de Dell sont également jugées fautives, et le tribunal prononce une condamnation à des dommages et intérêts pour ce motif. commentaire de Me Cuif
UFC c. HP (Cour d'Appel de Versailles, 5 mai 2011) Le tribunal a jugé que le consommateur ne bénéficie pas d’une information suffisante et qu’il se trouve « amené à prendre une décision à propos de l’achat d’un ordinateur qu’autrement il n’aurait pas prise » et que cela constitue une vente trompeuse au sens de l’article 7 de la directive et contraire à l’article L. 122-1 du Code de la consommation. commentaire par Me Cuif
Perrono c. Acer (Aix en Provence, 17 février 2011) Le juge prend en compte l'arrêt Pétrus et l'arrêt Guerby et prend argument de l'article L. 122-1 du code de la consommation interprété au regard de la directive européenne 2005/29/CE. Ce retour de l'article L. 122-1 est un tournant. commentaire par Me Provost
Arrêt Guerby c. Darty (Cour de Cassation, 15 novembre 2010)

Cet arrêt étend l'interprétation de la pratique commerciale déloyale aux vendeurs.

Il a été obtenu grâce à la persévérance de L. Guerby et de ses conseils.

commentaire par Me Cuif
Petrus c. Lenovo (Cour de Cassation, 15 novembre 2010)

Par cet arrêt, la cour demande aux juges de vérifier s'il n'y a pas eu pratiques commerciales déloyales. Cet arrêt de la Cour de Cassation est un arrêt "publié". Il fait donc autorité.

Il a été obtenu grâce à la persévérance de S. Pétrus et au soutien de l'AFUL.

commentaire par Me Cuif
Sierra c. Acer (Bourges, 4 mai 2009) Ce jugement a été rendu sur la base du défaut d'information contractuelle (articles L. 113-3 et R. 132-1 du Code de la consommation). commentaire par Me Cuif
CJCE2009 Les états ne peuvent adopter une réglementation plus restrictive que la directive 2005/29/CE. commentaire par Me Cuif
Matériel et logiciel sont deux produits distinctsTextes    
AffaireRemarqueAnalyse
Vermel c. Dell (Toulouse, 20 mai 2011) Le juge rappelle que le matériel et les logiciels sont deux éléments distincts. commentaire de Me Cuif
UFC c. HP (Cour d'Appel de Versailles, 5 mai 2011) La Cour de Versailles a retenu que le système d’exploitation était un logiciel indépendant du matériel en ce qu’il correspondait à un élément intellectuel relevant de la prestation de services, que cette indépendance était d’ailleurs confirmée par la présence de systèmes libres dont l’utilisation s’était répandue, et que juridiquement, le matériel et les logiciels suivaient deux régimes différents. commentaire par Me Cuif
Proc. c. Dell (TGI-Montpellier, mai 2009) Le jugement du 17 juin 2008 est entièrement confirmé.  
UFC c. Darty (TGI-Paris, 24 juin 2008) et ordonnance (18 juillet 2008) Le tribunal rappelle que matériel et logiciel sont deux produits distincts, soumis de surcroît à des régimes juridiques distincts. Il ordonne à la société Darty d'afficher désormais le prix détaillé du matériel et du logiciel.  
Proc. c. Dell (TGI-Montpellier, 17 juin 2008) Le tribunal rappelle que matériel et logiciel sont deux produits distincts, soumis de surcroît à des régimes juridiques distincts. Il ordonne à la société Dell d'afficher désormais le prix détaillé du matériel et du logiciel. Il la condamne à verser 50 000 euro d'amende à ce titre.  
Pourvoi 04-86592 (CC Crim, 02/11/2005) Arrêt de la Cour de Cassation justifiant le fait que la fourniture d'un logiciel, qui ne confère à son acquéreur qu'un droit d'usage, constitue une prestation de service.  

Depuis 2006, les arguments juridiques ont évolué.

Les premières batailles (jugements rendus de 2006 à début 2008) ont porté principalement sur l'article L. 122-1 du Code de la consommation prohibant notamment la vente liée. Mais à l'époque, les juges et la DGCCRF ont plusieurs fois fait valoir le prétendu intérêt du consommateur à avoir des machines préinstallées comme motif légitime pour refuser de sanctionner la vente liée. À tort, car dans cet article, le motif légitime ne concerne pas les ventes subordonnées. Du fait de cette erreur dans laquelle les juges se sont engouffrés, les premières batailles ont été incertaines.

Les batailles suivantes, de 2008 à début 2009, ont été livrées sur le terrain du droit contractuel. Le contrat de licence (CLUF) prévoyant, à de rares exceptions près, une possibilité de "remboursement", les demandeurs avaient réclamé au tribunal la simple application de ce contrat. Le plus souvent, les juges ont fait droit à leur demande, mais ils ne réalisaient pas toujours le préjudice subi par les demandeurs qui, en réalité, avaient moins de choix que les autres. Les décisions ont donc été, là aussi, variables.

En 2009, l'article R. 132-1 a fourni un argument de poids aux demandeurs puisque le CLUF, ainsi que les modalités éventuelles d'indemnisation en cas de refus dudit contrat, ne sont pas connus au moment de l'achat. Les juges ont donc donné raison aux demandeurs en jugeant que de telles clauses devaient être considérées abusives. Sans surprise, après le premier jugement s'appuyant sur cet argument (Sierra c. Acer), les autres décisions sont allées dans le même sens.

En avril 2009, la Cour de Justice des Communautés Européennes a rendu un arrêt qui a été diversement interprété. Certains y voyaient  la fin de l'interdiction de la vente liée. Nous y voyions au contraire les prémices de la jurisprudence favorable issue de la directive 2005/29/CE sur les pratiques commerciales déloyales des professionnels.

En novembre 2010, deux arrêts simultanés (mais principalement l'arrêt Pétrus) de la Cour de Cassation ont retenu que la vente liée au sens des dispositions de l'article L. 122-1 du Code de la consommation devait être interprétée à la lumière de la directive 2005/29/CE. Avec cette jurisprudence de la Cour suprême, les jugements rendus ultérieurement se sont conformés à ces prescriptions. Ce retour de l'article L. 122-1 est un tournant et les arguments invoqués aujourd'hui devant les tribunaux portent principalement sur la question des pratiques déloyales encadrées par la directive du 11 mai 2005. En octobre 2011, un nouvel arrêt de la Cour de Cassation, en cassant l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 26 novembre 2009 dans l'affaire UFC Que Choisir c. Darty, réaffirme l'obligation pour le vendeur d'informer le consommateur de toutes les caractéristiques essentielles des produits, y compris le prix des licences logicielles. Cette évolution de la jurisprudence a été détaillée dans un article du cabinet Wilhelm et associés paru dans le numéro de février 2012 de la revue Jurisclasseur "Contrats Concurrence et Consommation". Le 9 janvier 2012, la juridiction de proximité d'Aix-en-Provence devant laquelle était renvoyée l'affaire Pétrus/Lenovo, juge que la pratique de Lenovo est déloyale sur la base de l'article 29 de l'annexe 1 de la directive 2005/29/CE, autrement dit il s'agit d'une vente forcée. Par conséquent, elle condamne Lenovo sur la base de l'article L. 122-1. Le 10 janvier 2012, la juridiction de proximité de Saint Denis utilise pour la première fois de manière explicite l'argument de vente forcée (article 29 de l'annexe 1 de la directive 2005/29/CE et article L. 122-3 du Code de la Consommation) pour condamner le constructeur Samsung. Cette argumentation très directe est un tournant. Lire notre communiqué et le commentaire de Me. Cuif.

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